ORDRE DU JOUR N°17 DU COLONEL DESTREMAU

Insigne RICM

Nous sommes rassemblés ce soir pour inaugurer ce qui va devenir le monument du souvenir du Régiment d'Infanterie Chars de Marine.

Notre régiment est le régiment aux trois fourragères, aux treize noms de batailles, aux dix-huit citations, aux dix-neuf milles morts et disparus, le 1er Régiment de France. Sur ce mur est scellée en lettres de fer notre devise : Recedit Immortalis Certamine Magno. Ils Revinrent Immortels de la Grande Bataille.

L'étendue de leurs sacrifices et de leurs succès a valu à nos anciens une place particulière dans l'histoire de notre pays. Nul ne peut oublier ce qu'ils ont fait et donné. Ils sont allés au bout de leurs forces, de leurs intelligences, de leurs vies pour restaurer l'honneur et la liberté de leur pays. Ce magnifique exemple nous a guidé depuis.

Aujourd'hui anciens et jeunes sommes rassemblés pour un hommage à tous ceux qui nous ont quittés, à nos Justes.

Nous voulons aussi avoir une pensée particulière pour les derniers tombés. Après la fin de la guerre d'Algérie, la France n'a plus connu de grands conflits embrasant toute la nation. La défense du droit des hommes et les voies de la puissance nous ont emmenés sur de nouvelles routes, chargées de détours mais aussi de sommets.

Après l'interruption des années soixante et soixante-dix, le régiment est reparti en opérations.

Depuis 1978, il a été engagé dans toutes les guerres pour la paix. Et les marsouins du RICM ont continué à emporter avec eux cette superbe devise. Ils ont combattu avec succès le non-sens de la violence, cherché à faire cesser les guerres, l'absurdité du chaos.

Plus que tout autre corps, notre régiment a versé le prix du sang dans ces combats difficiles où la victoire ne s'obtient pas par la force des armes. Nous l'avons fait pour l'honneur de notre pays, de notre drapeau, pour les nôtres et nous-mêmes. Nous l'avons fait parce que seul le combat contre la mort donne du sens à la vie. Nous l'avons fait parce que seule la voie étroite de l'honneur et du succès nous rend immortel.

La liste de nos camarades disparus est terriblement longue : Caporal-chef C. MARIE Liban 1978, sergent J-M GEMEHL, caporal-chef J-L. FONTAINE Tchad 1978, caporal-chef G. PARENT Tchad 1979, caporal B. BONTEMPS, lère classe E. GOUBEAU Liban 1984, sergent-chef J-L. NAVARRO, caporal-chef A. GUEGUAN, caporal M. DUBREUIL Ex-Yougoslavie 1992, capitaine E. DORLEANS Ex-Yougoslavie 1995, adjudant-chef T. BARATHIEU, adjudant-chef Ph. CAPDEVILLE, sergent-chef F. DELON, sergent L. DERAMBURE, caporal D. DECUYPERE Côte d'Ivoire 2004.

Leurs pertes nous ont diminués, nous ont fragilisés et endurcis.

Alfred de Musset a écrit ces vers étranges : "L'homme est un apprenti, la douleur est son maître Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert".

Tous ceux qui ont perdu un camarade au combat, toutes les femmes qui ont perdu un mari et les enfants, un père comprennent sans doute ce que ces vers veulent dire. Dans la douleur, nous avons appris l'immense prix du sang et de la vie. Nous avons des liens que d'autres ne peuvent pas saisir. Nous savons sans doute mieux que d'autres ce que la joie d'être ensembles et de partager veut dire.

Ayons maintenant une pensée pour eux qui ont rejoint le Dieu des marsouins.

Nous leur devons une part de notre gloire. Nous leur devons une part de notre immortalité.

Ensembles, jeunes et anciens, familles du Régiment d'Infanterie Chars de Marine, réunis ici par le souvenir de nos disparus, commémorons ceux qui ont donné leurs vies pour la France et le droit, mais aussi pour nous.

Que leur exemple nous guide, qu'il nous rappelle tout ce que nous devons à nos anciens, à ceux qui nous ont guidé nos pas. Nous pouvons regarder la vie avec confiance et fierté. Par leur sacrifice, ils nous en ont montré toute la valeur.

Chérissons d'être tous réunis ce soir, autour d'eux et avec tous ceux qui comptent dans notre vie, ceux pour lesquels nous serons prêts demain à repartir aux combats, pour le succès des armes de la France et la défense de notre patrie.